«Tookie» a été exécuté
Malgré une gigantesque campagne en faveur de l'ancien chef de gang repenti, le gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger, a refusé de commuer sa peine • Stanley «Tookie» Williams est mort par injection létale mardi à 0h35, heure californienne •
Mardi à 0h35, heure californienne, après 24 ans dans le couloir de la mort, «Tookie» a été exécuté par injection létale dans la prison de San Quentin. Les appels des supporters de l'ex-chef de gang Stanley Williams, dit «Tookie», n'ont pas pu empêcher l'application de la sentence, alors que le gouverneur Schwarzenegger avait rejeté sa demande de grâce quelques heures plus tôt.
A l'annonce de la nouvelle, la foule de plusieurs milliers de personnes rassemblée à l'extérieur de la prison a laissé éclater sa colère.
«C'est fini, mais ce n'est pas fini», a lancé le révérend Jesse Jackson, un partisan de Williams. L'ancien fondateur des Crips repenti avait consacré ses années de prison à prêcher la non-violence.
Selon le récit de Steve Lopez, un journaliste du
Los Angeles Times qui a assisté à l'exécution, Williams «s'est laissé faire sans résistance», et a «levé la tête à plusieurs reprises» alors que les employés du pénitencier l'attachaient au fauteuil pour lui administrer la solution mortelle.
«Tookie» le repenti n'a pas ému Schwarzenegger
Le gouverneur a refusé sa grâce. Son exécution doit avoir lieu ce matin.
Au début de l'année 1998, un grand débat avait saisi les Etats-Unis : fallait-il exécuter Carla Faye Tucker ? Cette meurtrière avait découvert la foi chrétienne et était devenue une détenue exemplaire. Malgré une énorme campagne, un appel du pape, et même les reproches de l'une de ses propres filles, le gouverneur du Texas de l'époque, George W. Bush, avait refusé de commuer sa peine. Elle avait été exécutée le 3 février. Ce jour-là, Bush avait acquis l'image d'un dur et les faveurs de la droite musclée. Hier, un autre gouverneur républicain, l'ancien acteur Arnold Schwarzenegger, a marché sur ses traces : placé devant un dilemme similaire, il a refusé la grâce d'un ancien criminel, Stanley «Tookie» Williams. Dimanche soir, la Cour suprême de Californie avait déjà refusé de commuer la peine de cet homme devenu exemplaire. Son exécution par injection était programmée aujourd'hui à minuit une (ce matin neuf heures, heure française). A quelques heures de l'exécution, un témoin ­ un ancien détenu ­ avait pourtant apporté de nouveaux éléments tendant à le disculper. Ils n'ont pas été retenus en sa faveur.
Comme dans le cas de Carla Faye Tucker, une campagne passionnée a été menée jusqu'à la dernière minute pour sauver Tookie (
Libération du 5 décembre). De nombreuses stars d'Hollywood ou du rap se sont mobilisées. Une pétition a réuni plus de 32 000 signatures. Si le cas de Tookie, 51 ans, a soulevé de telles passions dans l'opinion, c'est parce que, comme dans l'affaire Tucker, c'est l'histoire d'une rédemption, notion centrale de la culture américaine. Williams clame son innocence pour les meurtres dont on l'accuse, mais ce n'est pas l'aspect qui émeut le plus ses partisans. Tookie est surtout un pêcheur qui a rejoint le camp du bien.
Stanley Williams a été condamné pour avoir tué quatre personnes en 1979 : le gérant d'une supérette qu'il dévalisait et, un mois plus tard un couple taïwanais qui tenait un motel, ainsi que leur fille de 43 ans, qui leur rendait visite. A l'époque, il dirigeait l'un des plus terribles gangs de South Central Los Angeles, les Crips, qu'il avait fondé huit ans plus tôt, à l'âge de 17 ans. Ce gang a été par la suite à l'origine de dizaines de meurtres.
A peine arrivé dans sa prison de San Quentin, Tookie Williams devient rapidement l'un des caïds les plus durs. Il est isolé plus de six ans dans une cellule de haute sécurité où il se transforme. Il rejette la violence et décide de militer. En 1996, avec l'aide d'une journaliste, Barbara Becnel, il signe une série de livres pour enfants (
Tookie parle contre la violence des gangs), dont il reverse les recettes à des organisations de lutte contre la délinquance. Ses livres ont une influence jusqu'en Afrique du Sud : Winnie Mandela lui rend visite. Il sert d'intermédiaire pour mettre fin à la guerre entre les gangs Crips et Bloods. Il monte un site web (
www.tookie.com) et un projet Internet
«pour la paix dans les rues». Il rédige un livre sur la vie en prison. L'an dernier, enfin, il publie son autobiographie, elle aussi empreinte de non-violence,
Blue Rage, Black Redemption. Chacune de ses initiatives renforçait l'absurdité de son exécution car, comme le constatait récemment Barbara Becnel, il s'agit de
«tuer un homme qui sauve des vies».
Stanley «Tookie» Williams, ancien chef de bande, a été exécuté par
iJj
J'ai pas de mots, ni de smileys assez forts pour qualifier cet assassinat!! En espérant que ton oeuvre rédemptrice servent aux générations futures,
R.I.P Tookie!!ne
Ejection dans la nuit de lundi à mardi dans la prison d'Etat de San Quentin, en Californie, après le refus du gouverneur Arnold Schwarzenegger de le gracier. Le fondateur du gang des Crips avait été condamné à mort pour quatre meurtres commis en 1979 en dépit de ses protestations d'innocence