Conseil du JDF de cette semaine sur OLG
UNE SEMAINE APRES SA PREMIERE COTATION, L'ACTION DE L'OLYMPIQUE LYONNAIS S'ECHANGE DEJA SOUS SON COURS D'INTRODUCTION
La Bourse attend que les clubs de football prouvent la fiabilité de leur modèle économique
C'est fait : l'Olympique Lyonnais est entré en Bourse. En dépit d'une importante couverture médiatique, l'opération s'est, pour l'heure, soldée par une baisse du cours de l'action du premier club français de football coté. Les marchés financiers s'inquiètent, sans doute à juste titre, de la forte corrélation qui existe entre les résultats sportifs et les performances financières. Le scepticisme est également perceptible du côté de nombreux présidents de clubs et de Michel Platini, qui vient d'être nommé à la tête de l'UEFA. Par ailleurs, peu de clubs remplissent aujourd'hui les critères exigibles pour entrer en Bourse, à commencer par la possession d'un stade, qui permet de créer un socle de valorisation financière. Et la France est encore très en retard par rapport à ses voisins britanniques, allemands et espagnols. Alors y a-t-il vraiment un avenir pour les clubs de foot à la Bourse de Paris ? Leur modèle économique est-il fiable ? Peut-on vraiment considérer cette industrie comme n'importe quelle autre activité économique ? Et comment valoriser les clubs de foot ? Ce sont là toutes les questions auquel ce dossier exclusif tente de répondre.
par YANNICK DUVERGÉ
L'Olympique Lyonnais n'est pas encore champion en Bourse
Vendredi 9 février. C'est l'euphorie dans la salle de la corbeille du Palais du Commerce de Lyon. Echarpe aux couleurs du club de l'Olympique Lyonnais (OL) autour du cou, le président du premier club de football à faire appel à l'épargne publique en France, Jean-Michel Pierre Mondy, surveille les écrans. Les premiers échanges d'actions foot sont prometteurs : à 11 h 15, soit quinze minutes après le coup d'envoi de l'opération, le titre s'adjuge une progression de 5,71 %, pour s'échanger à 25,37 euros. Il faut dire que tous les indicateurs étaient au vert la veille de ce lancement ultramédiatique. Le placement, qui faisait l'objet d'une augmentation de capital de 3,67 millions d'actions, avait été sursouscrit plus de 6,3 fois auprès des investisseurs institutionnels (90 % de l'opération), la demande des particuliers (10 % seulement de l'offre) ayant été 4,3 fois supérieure à l'offre. Introduit dans le haut de la fourchette de prix initialement proposée, le club est valorisé plus de 300 millions d'euros. D'emblée, il s'installe comme le troisième club de football en Europe en termes de capitalisation boursière.
Le bleu et le rouge du blason de l'OL font depuis pâle figure. A la clôture de cette première journée de Bourse, les écrans se sont figés sur un cours de 24,2 euros par action, soit une timide progression de 0,83 % par rapport au prix d'introduction de 24 euros. Le week-end aura eu raison de l'engouement des débuts : l'action OL Groupe clôture la séance du lundi 12 février en repli de 1,53 %... Pas de doute, une partie des 14.000 souscripteurs particuliers et des 139 investisseurs institutionnels (dont un tiers de britanniques) ont cédé plus de titres dès le deuxième jour de cotation que la demande ne pouvait en absorber. « Les mauvaises performances boursières enregistrées par la majorité des clubs de football en Europe ont de quoi entretenir le scepticisme, affirme le trader d'une salle de marchés financiers. L'OL va donc devoir faire ses preuves sur le long terme pour convaincre la Bourse. »
La performance financière reste liée aux résultats sportifs
De conviction, Jean-Michel Pierre Mondy n'en manque pas. Quand il rachète l'Olympique Lyonnais en 1987, le club évolue alors en seconde division. Il s'entoure rapidement d'investisseurs, tel le président de Pathé, Jérôme Seydoux, et recrute progressivement des joueurs d'envergure internationale. Des efforts payants, puisque le club affiche ainsi le titre de champion de France pour la cinquième année consécutive. Le club s'est taillé une réputation européenne en atteignant à deux reprises les quarts de finale de la prestigieuse Champion's League organisée par l'UEFA (association de football européen). Dans l'entourage de Jean-Michel Pierre Mondy, certains ont même l'audace de croire que l'OL n'a plus à faire ses preuves en matière de résultats sportifs.
Selon la société d'études Ineum Consulting, Lyon est de loin le club dont les résultats sont les plus réguliers sur cinq ans, devant l'AS Monaco et l'AJ Auxerre. Sur dix ans, le club rhodanien se place en deuxième position derrière Monaco, mais devant le Paris-Saint-Germain et les Girondins de Bordeaux. Vincent Chaudel, responsable du département sports d'Ineum Consulting, affirme que « Lyon affiche les meilleurs résultats sportifs sur longue période, mais aussi le chiffre d'affaires le plus important, ce qui montre qu'il y a corrélation entre les résultats des clubs et les revenus qu'ils engrangent ».
Le club de l'OL est également celui qui enregistre les meilleures recettes de billetterie par rapport au total de ses revenus, très loin devant le PSG et l'Olympique de Marseille. La marque lyonnaise est si attrayante que le club parvient à attirer 67 % de ses 26.000 abonnés en moyenne à chacune de ses rencontres, mais reste encore très loin derrière l'OM, qui enregistre un taux de 82 % sur cet indicateur !
Si Jean-Michel Pierre Mondy s'est tant battu contre les opposants à la cotation en Bourse des clubs de football, c'est qu'il est persuadé de pouvoir greffer aux aléas sportifs un véritable modèle de développement économique axé autour des loisirs et du tourisme. Grâce aux 100 millions d'euros levés en Bourse, il compte financer la construction d'un OL Land.
Ce quasi-parc d'attractions dédié au club comprendra dès 2010 un stade flambant neuf de 60.000 places, un centre d'entraînement, un centre de divertissement pour les Lyonnais, deux hôtels, ainsi qu'une galerie marchande de 20.000 m2. Coût de l'opération : plus de 260 millions d'euros, dont une partie sera financée par la vente du nom du stade à un partenaire publicitaire. Cette opération s'inspire du modèle du stade d'Arsenal au Royaume-Uni, qui a loué le nom à la compagnie aérienne Emirates pour 150 millions d'euros. Selon nos informations, l'exploitation du nouveau stade et des futurs actifs immobiliers attenants pourrait générer 30 millions d'euros de revenus supplémentaires pour l'OL.
Pour être moins dépendant des revenus audiovisuels. La direction du club rhodanien espère réaliser 60 % de son chiffre d'affaires avec la vente de billets et de produits dérivés (vêtements aux couleurs du club, agence de voyages, chaîne de télévision en propre, etc.) d'ici à 2009-2010.
Parallèlement, le club s'est engagé dans son document d'introduction en Bourse à faire progresser son chiffre d'affaires durant la saison 2006-2007. Mais ce sont là les seuls objectifs qui aient été dévoilés.
Des expériences boursières malheureuses en Europe
L 'Olympique Lyonnais est le premier club de football français à tenter l'aventure boursière. Mais il est le trente-huitième à faire appel à l'épargne publique en Europe depuis 1983, année d'introduction du pionnier du genre, le club britannique de Tottenham Hotspur. On trouve ainsi en Bourse de nombreux clubs anglais (Arsenal, Newcastle United, les Rangers de Glasgow, Birmingham, Southampton...), quelques étoiles italiennes (Juventus, Lazio de Rome, AS Roma), un allemand (Borussia de Dortmund), trois clubs turcs (Fenerbahçe d'Istanbul, Galatasaray et Besiktas), plusieurs grands du football danois (Parken, qui détient le stade et le club de Copenhague, Brondby, Aarhus, Aalborg et Schaumann), et, enfin, deux clubs portugais (FC Porto et Sporting de Lisbonne) et le néerlandais Ajax d'Amsterdam. Vingt-quatre ans plus tard, le bilan des valeurs foot est loin d'être brillant. Avec la récente introduction de l'Olympique Lyonnais, l'ensemble des valeurs du secteur représente moins de 3 milliards d'euros de capitalisation boursière en Europe, une valorisation à peine comparable à celle de l'équipementier aéronautique Zodiac.
Deux indices reflètent les piètres performances du football en Bourse : le Bloomberg European Football Club et le Dow Jones Stoxx Football, qui comprennent chacun vingt-sept valeurs. L'an dernier, l'indice Bloomberg a enregistré une hausse globale de seulement 4,35 %, alors que le CAC 40 s'envolait de 16,5 % sur la même période. C'est, en revanche, la débâcle du côté des clubs italiens. Reléguée dans le fond du classement de la seconde division, la célèbre Juventus de Turin a vu son cours chuter de 48,1 % depuis son introduction à la Bourse de Milan en décembre 2001. Le Lazio de Rome fait encore pire : - 83,3 % depuis son premier appel à l'épargne publique daté de septembre 1996.
Introduite à 2,4 euros par action, l'action est devenue une penny stock, c'est-à-dire une action cotant moins de 1 euro, puisqu'elle s'échange aujourd'hui à 0,4 euro.
Produits dérivés et marques fortes : les critères essentiels de la valorisation des clubs
On voit de tout et n'importe quoi en Europe pour tenter de valoriser un club de football. Certains comparent des clubs à des sociétés de médias en leur appliquant les mêmes multiples de résultat d'exploitation. D'autres les assimilent à des entreprises de tourisme et de loisirs. Ce critère nous semble beaucoup trop aléatoire, car la constitution du compte de résultat d'un club comprend des éléments extrêmement volatils (lire article précédent). Comme l'observe Arnaud Frerault, analyste chez Cheuvreux, « le résultat d'exploitation d'un club peut se déformer de manière importante. S'il engrange un nouveau contrat de partenariat publicitaire ou de sponsoring, l'OL peut faire varier son résultat d'exploitation de 2 à 5 millions d'euros ». Pour valoriser un club, l'approche par l'actif net réévalué nous semble plus pertinente. Certains analystes financiers n'ont pas hésité à comparer Manchester United à Gucci ! Une marque de luxe est généralement valorisée entre 1,5 et 2 fois le chiffre d'affaires qu'elle génère. Nous estimons que, une fois le chiffre d'affaires, pour un club de football, constitue un niveau plus raisonnable.
Pour l'OL, la marque serait ainsi valorisée 127,7 millions d'euros au titre de la saison 2005-2006, hors produits des ventes de joueurs. Ce montant est d'autant plus crédible que l'homme d'affaires Jack Kachkar serait sur le point de racheter l'Olympique de Marseille, structurellement déficitaire, pour 115 millions d'euros. En ajoutant le montant des fonds propres de la société (40,5 millions d'euros à fin juin 2006 et la plus-value latente sur les joueurs de l'équipe (95,1 millions d'euros), la valorisation théorique d'OL Groupe ressort à 263,3 millions d'euros, soit 28,3 euros par action.
Les sources de revenus sont trop dépendantes des résultats sportifs
La Bourse est la seule solution pour essayer de rattraper le retard du football français », n'a cessé de clamer Jean-Michel Pierre Mondy, président de l'Olympique Lyonnais. Les clubs de football français - faut-il le souligner ? - ne sont pas des machines à cash comme on peut en rencontrer au Royaume-Uni. Selon le baromètre exclusif Scanclub/Journal des Finances (lire notre article page suivante), six des vingt premiers clubs de football français de la Ligue 1 affichent une solidité financière insuffisante : le RC Strasbourg, l'AC Ajaccio, le FC Nantes-Atlantique, le FC Metz, le Stade Rennais FC et le FC Girondins de Bordeaux. Quant au RC Lens, il affichait encore des pertes sur l'exercice 2005... Le public français n'est pas aussi fidèle que ses voisins d'outre-Manche. Et la majorité des stades ont besoin d'une bonne rénovation pour espérer louer des loges haut de gamme à des tarifs élevés.
« Le problème du football est que son modèle économique n'est pas encore tout à fait défini, du moins dans l'Hexagone, explique Arnaud Frerault, analyste financier de la société de Bourse Cheuvreux. Le football en Bourse constitue un investissement sportif dans tous les sens du terme, car son modèle reste, pour l'heure, extraordinairement sensible. » Selon l'analyste, une non-qualification de l'équipe de Lyon à la Champion's League ferait fondre le chiffre d'affaires du club de 24 % et ses profits de 91 % ! Le football en Bourse est donc un investissement à haut risque car les principales sources de revenus des clubs sont extrêmement volatiles.
Il y a tout d'abord les droits audiovisuels. En France, ils sont centralisés par la Ligue de football professionnel (LFP), puis reversés équitablement pour moitié à 80 % aux clubs de Ligue 1, les membres de la Ligue 2 se partageant les 20 % restants. L'autre moitié est reversée aux clubs en fonction de leurs résultats sportifs et du nombre de diffusions télévisées qu'ils sont parvenus à enregistrer.
Fort heureusement pour les clubs, les médias se disputent tellement la diffusion des matchs de Ligue 1 qu'ils se livrent à une véritable surenchère.
En 2005, le groupe Canal+ a ainsi signé un engagement de 1,8 milliard d'euros pour obtenir l'exclusivité de la diffusion en direct de toutes les rencontres de Ligue 1 sur une période de trois ans.
Le montant proposé par la chaîne cryptée a augmenté de 60 % par rapport au dernier contrat qui avait été signé en 2004, et a été multiplié par 39 depuis le premier accord de diffusion signé en 1996 ! Au Royaume-Uni, les chiffres atteignent des sommets. Les groupes de médias BSkyB et Setanta ont acquis les droits audiovisuels de la Premier League de football anglaise jusqu'en 2010, pour la somme faramineuse de 2,5 milliards d'euros (1,7 milliard de livres sterling), soit une augmentation de 66 % par rapport au dernier contrat qui avait été signé par BSkyB et la BBC en 2004 ! En Allemagne, la chaîne de télévision à péage Première n'a pas hésité à offrir 16,7 % de son capital au consortium de câblo-opérateurs Arena (groupe Unity Media) pour retransmettre les rencontres de la Bundesliga par satellite jusqu'en 2017. Devant ces montants qui donnent le tournis, l'OL doit donc conserver un classement de premier ordre s'il veut continuer à engranger des revenus importants. L'an dernier, les droits audiovisuels ont représenté 43,1 % de son chiffre d'affaires.
Deuxième facteur dépendant des résultats sportifs : les primes accordées aux clubs en fonction de leur classement dans les différents championnats nationaux et internationaux.
Pour la saison 2005/2006, la LFP a offert 16,6 millions d'euros au premier club de la Ligue 1, 14,4 millions d'euros au deuxième et 12,5 millions d'euros au troisième du podium de tête. De son côté, la Ligue des champions (Champion's League) organisée par l'UEFA a rapporté l'année dernière 6,14 millions d'euros au vainqueur.
Troisième facteur de variation des revenus du football en Bourse : les transferts de joueurs. « Achetés » à prix d'or durant le « mercato » (marché des transferts ouvert deux fois par an), « les joueurs constituent une véritable marchandise qui s'achète et se revend avec une plus-value », comme nous l'a indiqué le jeune joueur d'origine camerounaise Aurélien Chedjou, qui vient de signer à Lille après un bref passage à Auxerre et à Rouen. Tous les achats de joueurs sont inscrits dans les livres de comptes d'un club. Ce dernier doit ensuite valoriser au mieux ce type d'actifs et mener « une politique de cessions de joueurs dès lors que leur valeur atteint des niveaux attrayants », a récemment déclaré Jean-Michel Pierre Mondy. Sur l'exercice 2005/2006 (clos le 30 juin 2006), l'Olympique Lyonnais a réalisé 38,4 millions d'euros de chiffre d'affaires grâce aux indemnités de transfert des joueurs.
Selon le site Internet allemand transfermarkt, le club britannique de Chelsea possède le plus beau portefeuille de joueurs (406,57 millions d'euros), devant le FC Barcelone (354,45 millions d'euros) et le Real Madrid (339,1 millions d'euros). Au 9 février, l'Olympique Lyonnais arrivait en douzième position des clubs européens, avec une valorisation de ses « actifs-joueurs » de 178,47 millions d'euros, mais c'est le premier club français très loin devant Bordeaux (83,25 millions d'euros) et l'OSC de Lille (78 millions d'euros). « Il suffit qu'un joueur soit en petite forme physique ou qu'il se blesse pour que sa valeur de marché chute considérablement », rappelle toutefois un agent de joueurs.
NOTRE CONSEIL
CONSERVER (code : OLG ; Comp. B).
La hierarchie du football français
Football La hiérarchie marketing et financière des clubs français
Quels clubs ont la plus forte attractivité marketing et lesquels présentent les meilleurs ratios financiers ? Ce sont les questions auxquelles répond le baromètre Scan Club, publié en exclusivité par Sport Finance & Marketing.
Les sociétés d'études et de conseil Advent et BFS,de Jérôme Neveu et d'Hervé Varillon , se sont unies il y a deux ans pour créer Scan Club, un outil permettant de positionner et de classer de manière objective et transparente l'ensemble des clubs de football français sur le plan économique. Scan Club compare les performances sportives, marketing et financières des clubs sur les mêmes critères. Après avoir publié en exclusivité au fil des semaines les indicateurs club par club, Sport Finance & Marketing établit un bilan global permettant d'établir une hiérarchie entre les clubs.
Marketing : OM,PSG, Monaco et...Lyon
Sur le plan marketing, le classement Scan Club spécifique à Sport F & M prend en compte deux critères : le taux d'attractivité nationale et le taux d'attractivité régionale. Des taux déterminés, notamment, à partir d'enquêtes ad hoc effectuées auprès de la population qui permettent de mesurer le rayonnement des clubs. Certains ayant une envergure nationale, d'autres essentiellement régionale. L'indicateur « taux d'attractivité nationale » fait logiquement apparaître l'OM comme une des valeurs « locomotive » marketing du football français. Les indicateurs de ce club sont très largement au-dessus de la moyenne des clubs étudiés. Le taux d'attractivité nationale a un indice de 402, soit 4 fois plus que la moyenne de l'échantillon : le club phocéen se positionne comme la marque nationale du football français. Derrière l'OM, deux clubs se partagent la place de dauphin : l'AS Monaco et le Paris Saint-Germain avec un indice de 337. Le PSG est un club à forte notoriété qui bénéficie d'un grand intérêt de la part du public, même s'il souffre d'un relatif déficit d'image. L'AS Monaco est un club très apprécié avec une excellente image véhiculée grâce notamment à la constance du club au plus haut niveau.