10-03-2006, 20:53
« Souvenirs, souvenirs
Je vous retrouve dans mon cœur
Et vous faites refleurir
Tous mes rêves de bonheur »
Ainsi commençait la complainte du poète belge, Lidl des jeunes, lorsqu’il se rappelait ses moments pleins d’allégresse qui appartiennent au passé. Bien avant lui, Proust replongeait en enfance en sentant les odeurs de Madeleine (et Madeleine, elle aime bien ça).
Tout ça pourquoi me direz-vous ?
Vous ne dites rien, et c’est tant mieux. Et je vais vous répondre quand même.
Que fait-on quand on a rien à se mettre sous la dent depuis des lustres, dans sa vie de supporters ? Que fait-on au lendemain d’une défaite face à un inconnu venu du froid qui nous à manger dans tous les secteurs de jeu ? On mange des fleurs. On fait du poney. On ouvre l’album photo. On regarde de vieux journaux. On se met à rêver après un exploit de minots. On rappelle à nos mémoires les derniers héros. Bref, on vit dans le passé, tel un Marty MacFly qui n’aurait pas envie de rentrer chez lui.
Ce week-end, le match va nous amener son lot de souvenirs à coups surs, à condition qu’on nous lâche les pinces avec les histoires du Parc. Sur la pelouse, on verra 19,5 titres de champion de France. 16 titres de vainqueur de la coupe de France, 5 finales de coupes d’Europe. Bref, le plein de titres d’hiver et avariés.
A lire ces lignes, on peut imaginer que ce choc de p’tit temps oppose 2 équipes au sommet de leur art ou au moins du championnat (rayez les mentions inutiles). On se dit : « Mazette ! En vrai, c’est ici qu’il faudrait chercher le notre de « classico » »
Sauf que, face à face, nous aurons deux équipes qui n’ont rien gagné depuis 1978 pour Saint-Étienne, 1993 pour l’OM (on mettra de coté le cours de rumba en tongs de RLD). Chaque club a connu son apogée, son heure de gloire, un moment où il régnait sur son pied des stades.
Selon une étude de l’INSEE, une Renault 12 sur 2 arborait un fanion de l’ASSE sous le rétroviseur à la fin des années 70. Toujours selon le même organisme d’étude, 56,43 % des Renault 5 avaient le pare-soleil « Allez l’OM » au début des années 90. De nos jours, on voit plutôt des strings et du Beaujolais OL. A chaque époque son leader, sa mode et ses objets de cul(te).
Et depuis ? le néant sidéral intergalactique.
Alors, restent les souvenirs pour faire mousser ce duel de préposés à l’intertoto! On se rappellera de l’OM pris la main dans le Bosquier, comment l’OM a pratiqué le curling à Guichard fermé, comment la panthère Alex qui a sorti ses griffes pour l’occasion, reviendront les images de l’ASSE et de ses poteaux carrés, de Herbin, on imaginera le duel Casquette contre Doudoune. Même Jean-Mimi ira de sa tirade sur comment il a inventé le football du temps de son passage en vert et pas mur.
Comme la serviette hygiénique et comme le Tampax, on ne peut plus se permettre de construire l’avenir sur du passé. Tout juste permettra-t-il de consolider les fondations, de se créer et de se forger une identité et quelques valeurs. Il y a danger à titiller la fibre des souvenirs sous peine de se voir infliger la sanction suprême : « C’était mieux avant, Miladiou ! ».
Allez ! Laissons de côté le Zénith, concentrons-nous sur Saint Etienne et bon, pitètre que dans 15 ans, on entendra sur la bande FM ce genre de chansons:
« Ce soir c’est le trentième match de la saison.
Et Ribéry a les cheveux blonds.
45000 personnes se tassent dans le Vél
Et Ribéry enlève son marcel.
Un ange qui passe dans les vestiaires
Et Ribéry enfile son maillot clair
Ce soir la lune escorte les champions
Et Ribéry affûte ses crampons
Ce soir la foule n'en peut plus de chanter
Et Ribéry évite les croche-pieds
Ce soir c'est sûr on va voir trembler les filets
Et Ribéry n'en peut plus de dribbler
Ce soir on joue à la maison
Et Ribéry demande le ballon
Ce soir le vent refroidit les testons
Mais Ribéry a marqué c'est bon. »